1972. La naissance d'un Chœur
Antoine Casez
Ces quelques lignes sont mon témoignage.
"Non je n'ai pas vraiment créé le Chœur des Marais Je n' ai fait qu'unir, pour répondre à une démarche alors nouvelle, d'éléments qui ne s'exprimaient plus dans leur cadre ou qui désiraient alouter à leurs activités musicales et chorales une nouvelle expression.
En 1964, après mes années d apprentissage à Mâcon auprès de Léon Zighera, je revenais à Villefranche pour prendre en charge la petite école de musique associative de l'Union Musicale que Claude Cottinet avait si longtemps animée avcc un inlassable dévouement. Dès mon arrivée, André Guillemin, Président de la Gaité, me proposait de diriger la section lyrique de cette grande société centenaire, créée par Désiré Walter, longtemps conduite par Louis Plasse, puis Georges Croisy et qui avait alimenté et inspiré par ses spectacles, revues, opérettes, comédies, la vie théatrale et musicale de notre cité alors tout à fait autonome.En 1964-65 j'exerçais solistes et choristes, tous membres de la Gaité en vue de la création du "Voleur de Lune" opéra en trois actes, musique de Jean-Claude Amiot qui en dirigea les nombreuses représentations. Ce fut une entreprise passionnante, un grand succès et un énorme travail pour tous. Son retentissement régional fut tel que Radio-Lyon s'empara de l'affaire et que nous enregistrions l'ouvrage, avec nos chanteurs et l'orchestre de la radio dirigés par Raymond Chevreux. C'était pour l'époque une incroyable consécration.
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L'année suivante, 1965-66, nous montions les "Mousquetaires au Couvent", opéra-comique de Louis Varney, toujours solistes et chœurs de ia Gaité accompagnés par des éléments de l'Orchestre Symphonique de Villefranche, le tout sous ma direction. Cette fois encore le succès fut si grand que nous ne cessions d'ajouter de nouvelles représentations à guichet fermé au théatre de Villefranche.
En 1966-67 nous reprenions le même ouvrage pour une autre série de représentations à Villefranche et à Bourg-en-Bresse. Puis nous devions constater que, malgré le succès public, il était de plus en plus difficile,voire impossible, de trouver et surtout de garder des choristes ayant une disponibllité suffisante pour se plier aux innombrables repétitions, d'abord musicales, puis de mise en scène. Il y en avait au moins trois par semaine, nos dimanches y étaient entièrement consacrés durant les mois qui précédaient les représentations. En outre on n'imagine pas la somme de travail et les budgets que demandaient, dans le plus total bénevolat, la création, puis la construction des décors toujours entièrement nouveaux, la confection des costumes pour habiller les troupes d'une soixantaine d'acteurs et chanteurs requises par ces ouvrages. Bref, il fallait renoncer au lyrique.
A peu près dans le même temps, précisément en 1970, Paul BIachére qul dirigeait l'Orchestre Symphonique de Villefranche depuis près de vingt ans décidait de se retirer et me proposait sa succession. L'Orchestre Symphonique avait pour coutume de monter deux à trois programmes annuels dont un dit "concert spirituel" qu'il donnait assez régulièrement:à Notre Dame des Marais, s'adjoignant la participation épisodique de chorales constituées: A Cœur-Joie, Cercle Saint Pierre, pour l'exécution de courtes pages de musique religieuse du genre "Cantique de Racine", chorals extraits de passions, etc... Lorsque je dus envisager le programme de ce concert, les chœurs de la Gaité en sommeil depuis deux ans étant disponibles et l'Ecole de Musique devenue entre-temps municipale et multipliant ses effectifs, je me trouvais à la tête de forces vives suffisantes pour oser vouer notre concert spirituel d la présentation d'un ouvrage du grand répertoire sacré, avec soli, chœurs et orchestre. Mon choix se porta sur le De Profundis de M.R. Delalande.
Et c'est là que se situe l'origine du Chœur des Marais.L'ensemble choral de cette année 1971 était composé d'un groupe "d'anciens" de la Gaité bien qu'ils fussent alors pour la plupart encore très jeunes-, de membres venus individuellement des sociétes amies: Cercle Saint Pierre, A Cœur Joie, Chorales de Montmerle et Denicé et d'une brochette d'éleves et de parents de I'Ecole Municipale de Musique. Il fallait lui donner un nom sur les affiches, mais pas un statut car je tenais à éviter d'entrer en concurrence avec les groupements existants. Je l'appelais "Association Chorale" ce qui, juridiquement, était un non-sens puisque sa particularité était de ne pas être une association loi 1901.
Dès ce temps là tous les principaux acteurs du futur Chœur des Marais étaient présents. Un tout jeune homme, Jacques Berthelon, qul avait immédiatement montré des qualités exceptionnelles, partageait avec moi les exercices de pupitres. Mesdames Chantal Bertrand, Haberer et Paour, Messieurs Francisque Perrut! Pierre Bouchard et l'Abbé Hermann, et combien d'autres qui n'ont cessé depuis de veiller sur notre enfant et le combler de soins.
1971-72: De Profondis de Delalande. 1972-73 : Messe du Couronnement de Mozart. 1973-74 : Messe en Sol de Schubert. 1974-75 : Messie de Haendel. 1975-aqc 76 : Messe en Ut de Beethoven et Te Deum de Gossec. 1976-77 : les Saisons de Haydn. Ces concerts annuels que nous produisions au printemps, d'abord à Villefranche, étaient enuite transportés dans d'autres lieux : Saint Clair de Lyon, Châteaux de Fléchère et de Vauxrenard, Collégiales de Belleville et de Beaujeu.
L'orchestre Symphonique était l'égal partenaire de toutes nos prestations. Je voudrais aussi rappeler certains solistes qui, bien qu'invités,étaient presque intégrés et dont le cachet,absolument symbolique était inversement proportionnel au talent et à la fidélité: Renée Moriset, Annie Tasset, Jeanne Girerd et présents dans presque tous les programmes: Marcel Dijoud et Robert Millet.
A la rentrée scolaire 1977-78 des raisons personnelles me contraignirent à quitter Villefranche et Je remettais entre les mains expertes de Jacques Berthelon notre chère Association Chorale.
La suite ne m'appartient plus. Ce sont de très nombreuses années de travail, de progrès et de succès. J'ai eu le bonheur, grâce à l'information régulière que m'ont toujours adressée leurs responsables, de les suivre de loin et de m'en réjouir. Que Chantal Bertrand et Jacques Berthelon acceptent l'expression publique de ma reconnaissance pour tant de fidélité et de délicatesse.
Nous n'avons pas à tirer gloire de ce que le destin nous a donné de réussir à un moment de notre vie. Je n'ai été, que par le jeu des circonstances, le personnage principal et provisoire du premier chapitre d'une belle et longue aventure.
La Gaité, l'Orchestre Symphonique, véritables géniteurs du Chœur des Marais, appartiennent désormais aux riches souvenirs du passé de Villefranche.
Puisse le Chœur des Marais garder fidèlement leur héritage."
Lyon, le 11 novembre 1991
Antoine Casez
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